LES HAOUSSAS
Leur Milieu:Plus de vingt cinq millions de personnes au moins parlent actuellement le haoussa, mais seulement six à huit millions sont d'origine haoussa. Cette unité linguistique regroupe une très grande diversité ethnique. Le terme haoussa ne désigne pas seulement l'ethnie, il désigne surtout tous les autres groupes ethniques qui participent à la culture spécifique haoussa grâce à une langue, une religion et des coutumes communes. On trouve des commerçants haoussa dans tout l'ouest africain. Le mot Haoussa, comme Dioula, est souvent synonyme de « commerçant ambulant musulman », quelle que soit réellement l'origine ethnique. Le pays dit haoussa est compris entre les villes de Nkonni (Niger) et Sokoto (Nigeria) à l'ouest, de Tahoua (Niger) au nord, de Zinder (Niger) à J'est, de Zaria (Nigeria) au sud. Les Haoussa sont très nombreux au Nigeria (quinze millions). Ils sont plus d'un million au Niger.
Métissés souvent aux Peul, héritiers comme eux d'une tradition conquérante, ils restent fiers de leurs origines. Ils se distinguent par le goût du luxe, de l'apparat, et la grande dignité de leurs chefs.
Leur Histoire:Les Haoussa, de race noire, chassés par les Touareg, auraient émigré de l'Aïr du VIIe au xe siècle vers le nord de la Nigeria.
C'est entre le Niger et son affluent la Bénoué qu'ils fondèrent quatorze cités États indépendants.
Ces cités ne surent pas s’unir et furent constamment menacées par leurs voisins Songhaï Ou ceux du Kanem Bornou ».
Ces cités étaient à la fois des citadelles fortifiées, des marchés caravaniers, des centres de productions artisanales importantes. Il y régnait une intense activité commerciale. D'ailleurs les Haoussa devinrent vite des commerçants aussi renommés que les Dioula manding (ils parcouraient toute l’Afrique occidentale avec leurs marchandises). Les États Haoussa réalisaient un système d'économie dans lequel le commerce et l'agriculture étaient parfaitement équilibrés avec des activités artisanales très développées correspondant parfois à de véritables manufactures de tissage, de maroquinerie. Des procédés de tissage et de teinture (particulièrement riches de coloris à la mode) permettaient la fabrication de pagnes très recherchés.
Au XVe siècle, sous le règne du roi Rimfa, Kano fut la première des cités haoussa. Elle l'était encore au XIXe siècle, en dépit des luttes incessantes entre les cités voisines. Kano habillait bien les deux tiers du Soudan et presque tout le Sahara central et oriental.
La quantité de tissus teints, expédiés annuellement à cette époque rien qu'à Tombouctou, représentait trois cents charges de chameaux et faisait travailler six familles de tisserands pendant plusieurs années.
Au début du XIXe siècle, sous le prétexte d'une guerre sainte, le conquérant Peul, Ousmane dan Fodio, s'empara de tous les États Haoussa (seul le Kebbi sut résister à cette conquête). Les Peul ont fourni pendant tout le XIXe siècle les dynasties des États Haoussa et une aristocratie dont l'influence religieuse, culturelle et politique fut considérable.
Leur Vie Economique:Les Haoussa sont surtout commerçants et artisans, mais pratiquent aussi l'agriculture. C'est pendant la longue saison sèche qu'ils se consacrent à l'artisanat ou au commerce. Les agriculteurs confient souvent leurs troupeaux aux Peul pendant la période de l'hivernage.
Leur Vie sociale:Les Houassa avaient une société extrêmement hiérarchisée. L'élément de base était le Gida, collectivité d'hommes et de femmes apparentés par les liens de descendance paternelle, unis sous l'autorité du plus âgé d'entre eux, le Maigida. A la tête de chaque État Houssa régnait un roi, Sarki, entouré d'une cour formée de dignitaires appartenant à la famille royale.
Les organisations socio professionnelles, appelées Sanaa, monopolisaient la plupart des activités artisanales. L'accès à ces professions était conditionné par l'héritage patrilinéaire du don, du rituel et du savoir, qui permettait à un individu d'exercer sans danger une technique particulière.
Chaque Sanaa possède une hiérarchie à l'échelon du village et de la région.
Leur Vie Religieuse:La religion musulmane fut introduite au XVe siècle par des missionnaires Toucouleur. Mais la religion musulmane des Haoussa resta encore accrochée à des cultes animistes anciens. Pour la masse des croyants, l'islamisation a consisté en une transposition du panthéon traditionnel Asna avec Allah comme Dieu tout puissant.
La religion Asna a encore une place importante dans la vie des Haoussa. Elle est fondée sur des cultes à des divinités (Iskou ou Bori) extrêmement nombreuses. Les cultes consistent en sacrifices, chasses rituelles, danses de possessions (Bori).
Le culte des Bori est pratiqué par un prêtre. Dans chaque quartier. dans chaque village, existe un Sarkin Bori, chef de la Confrérie.
Le Sarauniye Bori est chargé de surveiller le déroulement de chaque séance des danses de possession et particulièrement le moment où le génie « monte sur la tête » du possédé. Ce dernier, appelé « cheval des génies », doit être habillé d'une certaine façon au moment où le génie possède son cheval.
Leur Vie Culturelle:Fêtes. De nombreuses fêtes religieuses Asna ont lieu lors des semailles, des récoltes et pour les initiations. On célèbre également les trois grandes fêtes musulmanes.
Après les récoltes et pendant la saison sèche, des fêtes sont organisées pour faire se rencontrer les jeunes gens et les jeunes filles.
La langue haoussa est aujourd'hui l'une des plus évoluées et de, , plus parlées de l'Afrique occidentale. Les Haoussa ont une littérature écrite avec l'alphabet arabe. Ils ont composé des oeuvres historiques (girgams).
Une musique de Cour (fanfare en l'honneur des sultans) existe encore dans tous les sultanats Haoussa. L'orchestre est surtout composé de joueurs de grandes trompes (kakaki) ayant un ou deux pavillons en cuivre ou en fer blanc, certains pouvant atteindre trois mètres de long.
Les musiciens haoussa sont de remarquables virtuoses de l'algeita (sorte de hautbois). Ils peuvent souffler des heures sans s'arrêter en gonflant leurs joues démesurément pour emmagasiner le maximum d'air. Une aspiration par le nez leur permet de maintenir un volume d'air constant.
Les chants haoussa sont surtout accompagnés par une viole monocorde appelée godié ou inzad, dont la caisse de résonance est une calebasse recouverte d'une peau de lézard, l'unique corde étant faite avec des crins de cheval.
Les chants de louanges sont nombreux en l'honneur d'un chef, mais aussi d'un chasseur, pêcheur, cultivateur ou artisan.
Leur Vie Artisanale:Bien qu'en grande majorité commerçants et agriculteurs, les Haoussa ont aussi de remarquables artisans. Nous avons vu que les cités haoussa ont sédentarisé beaucoup d'entre eux qui se sont regroupés par métiers dans des organisations socio professionnelles, appelées Sanaa, qui ressemblent beaucoup aux corporations du Moyen Age. Dans les cités, on trouvait de véritables manufactures de tissage et de cordonnerie qui regroupaient de nombreux artisans travaillant en commun. Les rois et l'aristocratie, ayant le goût du luxe et de l'apparat, développèrent un artisanat raffiné comme celui de la broderie, de la teinture, de la maroquinerie, de la fabrication de perles de verre. Aussi l'artisanat fait il vivre encore d'innombrables familles.
HabitationUne invention particulière qu'on ne retrouve nulle part ailleurs en Afrique est une voûte, appelée d'ailleurs « voûte haoussa ». Pour remplacer les longues poutres en bois, de plus en plus rares, nécessaires à la construction des grandes pièces, les maçons haoussa ont construit des arcs en pisé plus ou moins brisés, qui divisent le plafond en caissons de plusieurs coupoles, décorées ensuite. La technique consiste à encastrer de grosses branches d'arbre ficelées entre elles dans les deux parties du départ de l'arc. Au fur et à mesure que l'on monte la voûte, on attache de nouvelles branches à l'armature déjà enrobée de pisé, et cela jusqu'à la jonction des deux tronçons de l'arc de la voûte. Une décoration en relief accentue le caractère de cette belle architecture équilibrée.
Les nervures sont peintes en rouge, bleu. On trouve ce type d'architecture à Zinder, Agadès, Tessaoua, Tahoua, Maradi.
HabillementBoubous blancs, indigo, bleu pâle, souvent brodés, portés par les hommes. (Ceux des chefs sont particulièrement riches en broderies.) Le vêtement traditionnel comprenait un pantalon (kalmi) et une tunique de peau (karobi).
Souvent, le Haoussa porte un bonnet brodé (genre de chéchia). Les femmes sont très coquettes et ce sont elles qui font la mode de tout le Soudan (Sokoto est le point de départ de cette mode).
Les pagnes (même imprimés industriellement) sont toujours très riches en coloris et en motifs nouveaux.
ParureNombreux gris gris qui pendent au cou. Bracelets de perles et de cuivre portés aux bras et aux chevilles.
Coiffures très élaborées, ornées de bijoux et perles.
Les femmes se teignent souvent les pieds et les mains au henné.
Tissage, broderieLes tisserands (Masâka, sing : Masaki) font partie de clans qui ont le monopole de ce travail artisanal. Ils font des pagnes aux dessin,, surtout géométriques : carreaux noirs et marron, bleus et blancs. brodés de jaune et de rouge, triangles, losanges, répartis entre les bayadères transversales de la bande étroite; pagnes (godo) blancs à fines rayures bleues, tissés à Birni N 'Konni, mais aussi à Tessaoua et à Maradi.
Couvertures (sakala) de Gaya, de Tillabéry, en coton rouge foncé. Les broderies haoussa sont célèbres dans toute l'Afrique occidentale. Les boubous brodés sont portés dans toutes les régions islamisées (rosace devant et derrière, brodées sur le revers gauche). Broderie de tapis de selle. On trouve la diversité de cet artisanat à Nkonni. Tahoua, Zinder, Maradi, Filingué, Tessaoua, Agadès et Niamey.
VannerieNattes faites enfeuilles de palmiers doum (kala) tressées par bandes cousues ensemble, sans décor.
A Madoua, grand centre de la vannerie haoussa très renommé on y fabrique des nattes décorées : on tresse une bande avec des feuilles de palmier doum colorées en noir et rouge, d'autres bandes sont laissées écrues. Le décor est en petits damiers et chevrons combinés. Le noir est obtenu en macérant les feuilles dans de la boue avec du tanin. Le rouge vient de tiges de kienné, sorte de sorgho sauvage. Les parois des cases en banco et paille des Haoussa sont recouvertes de nattes plus souples.
A Filingué, on fabrique de très belles nattes de neuf mètres de long avec, en lisière, des bandes de cuir tressées. Elles servent à entourer les tentes des Touareg.
Autres productions : filtre, éventail, filets de calebasse, chapeau, panier, dessus de calebasse en damiers noirs et rouges.